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Petite histoire de l'art abstrait
La minute arty 17 Jan 2019

Petite histoire de l'art abstrait

Kandinsky, abstraction
Vassily Kandinsky, Première aquarelle abstraite (1910)

Pour comprendre l’évolution d’un mouvement artistique, la diversité des styles des artistes et leurs influences, il est nécessaire de faire un saut en arrière. Aujourd’hui, Artsper vous propose un focus sur l’art abstrait. C’est parti pour un résumé de son histoire picturale, à lire avant votre prochaine exposition ! 

Débuts en Europe de l’Est

Frantisek Kupka, abstraction
Frantisek Kupka, Compliment (1912)

L’art abstrait naît au début du 20ème siècle. Le paysage artistique de l’époque se composait majoritairement du fauvisme, du cubisme et de l’expressionnisme figuratif. L’art est marqué par la libération de la couleur, des formes, et surtout, du sujet. Tant et si bien que peu à peu, la figuration est totalement laissée de côté, le contenu abandonné pour la forme pure. Audace et recherches chromatiques caractérisent cette période; le style des artistes s’affranchit de plus en plus des carcans académiques.

Les débuts de l’art abstrait sont difficiles à cerner. On constate en effet l’apparition simultanée de différents peintres aux styles variés, chacun apportant sa touche très personnelle à la définition de l’abstraction. S’il devait être donné une date au début de l’art abstrait, 1910 fait (quasiment) l’unanimité. Elle correspond à la Première aquarelle abstraite de Vassily Kandinsky. Ce peintre russe, rattaché au courant d’avant-garde d’Europe de l’Est, est le premier à peindre sans aucune figuration. Ainsi se définira l’art abstrait : un art qui, à l’opposé de l’art figuratif, ne représente pas la réalité, s’en abstrait. Cet art se concentre sur les couleurs et les formes. Il est libéré des habituels sujets ou objets du monde extérieur.

Rationalité et expressivité

Kasimir Malevitch
Kasimir Malevitch, Carré noir sur fond blanc (1915)

L’abstraction peut être résumée grossièrement en deux idées. D’une part, la recherche d’une rationalité, d’un ordre indépendant de la réalité extérieure. D’autre part, le développement de la fonction expressive et symbolique de la couleur, du rythme des formes, et de leur indépendance face au sujet. Les artistes comme Kandinsky, Kupka, Delaunay, trouvent dans la diversité chromatique un important panel d’émotions. Le rouge vif ou le bleu profond, étalés sur la toile, procurent un certain effet sur le spectateur, communiquent un état d’esprit. Le peintre tchèque Kupka, un des pionniers du mouvement, déclara : « il semble donc plus opportun de considérer et d’interroger les sensations de lumière, de caractère et de valeur différentes, en ce qu’elles suscitent en nous des états d’âme ».

Différents arts abstraits

Jackson Pollock
Jackson Pollock, Autumn Rhythm (Number 30), 1950

L’art abstrait est une mouvance riche, rapidement divisée en sous-catégories aux codes bien précis. Kandinsky est le représentant de l’abstraction lyrique ; l’on trouve au coeur de ses préoccupations la puissance des émotions et l’impact de la couleur sur l’être humain. Malevitch représente le suprématisme : un mouvement qui recherche la sensibilité picturale pure et où les formes et les couleurs sont travaillées pour elles-mêmes. Les œuvres de ce dernier sont plus géométriques, moins colorées que celles de Kandinsky, qui sont comparables à un tourbillon de formes et de couleurs, pourtant savamment organisé.

Piet Mondrian, quant à lui, avec ses carrés de couleurs primaires et ses lignes noires, ouvre la voie vers l’abstraction géométrique, un art presque mathématique. On note également le développement de l’orphisme. Il a été porté par les époux Delaunay. Ils usent de couleurs acidulées et formes arrondies recouvrant entièrement la toile. Ces différentes tendances sont quasiment concomitantes, et durent jusqu’aux années 1930.




L’introduction de l’expressionnisme abstrait

Victor Vasarely
Victor Vasarely, Marsan 2 (1964 – 1974)

Dans les années 1940-50 se développe une nouvelle mouvance de l’abstraction, instiguée par les peintres américains. Il s’agit de l’expressionnisme abstrait. Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, ce style nouveau envahit littéralement le paysage artistique. Des figures comme Jackson Pollock et Willem de Kooning marquent les esprits et comptent encore aujourd’hui parmi les plus prisés sur le marché.

Au sein de l’expressionnisme abstrait, selon les artistes, on distingue plusieurs dénominations. Pollock, par exemple, est le représentant de l’action-painting. Elle est une peinture caractérisée par les gestes virulents du peintre, qui secoue son pinceau au-dessus de la toile. Cela crée des taches de couleur (« spotting ») qui forment peu à peu l’œuvre. Ici, c’est l’acte physique du peintre qui est au centre du processus artistique, et non le sujet (par ailleurs inexistant) du tableau. Le colorfield-painting, grands aplats de couleurs vibrantes, est porté par des artistes comme Rothko ou Clyfford Still. Il prône une autonomie de la couleur, libérée du sujet et de la toile.

À partir de 1960 apparaissent principalement deux nouvelles tendances : l’art optique ou op art, et le minimalisme. Le hongrois Victor Vasarely est le père de l’op art, un art s’intéressant aux effets d’optique. Les artistes de ce mouvement (Julio Le Parc, François Morellet, Yaacov Agam) jouent sur les effets de couleur, forme et lumière pour créer des sensations visuelles chez le spectateur. À la même période émerge l’art minimal, porté par des artistes comme Sol LeWitt, Robert Morris ou encore Dan Flavin. Leur mot d’ordre est l’économie de moyens. L’art devient une structure simple, souvent géométrique, toujours abstraite.




Et si le père de l’abstraction était… une mère ?

Hilma af Klint, abstraction
Hilma af Klint – De tio största n°3 (1907)

Si l’on considère communément Kandinsky, Malevitch et Mondrian comme les fondateurs de l’art abstrait, l’histoire de l’art reste entourée de zones d’ombre, qui s’éclaircissent parfois avec le temps. Ainsi est revenue récemment sur le devant de la scène une artiste peintre, qui aurait été la véritable pionnière de l’abstraction picturale. Hilma af Klint, peintre suédoise, réalise en 1906, soit 4 ans avant l’aquarelle de Kandinsky, une série de peintures abstraites. Aurait-elle influencé les trois hommes ? Son statut de femme lui aurait-il porté préjudice, empêché d’accéder à la reconnaissance ? Ou alors, tout simplement, l’éloignement géographique de la Suède est-il seul à blâmer ? Quelle que soit la réponse à cette interrogation, la redécouverte de son œuvre est sans conteste à saluer.

Pour en savoir un peu plus sur l’art abstrait, et plus précisément sur ses acteurs contemporains, jetez un oeil à notre article sur les 10 artistes abstraits à connaître !