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L’art aborigène sur le marché de l’art
La minute arty 20 Juin 2016

L’art aborigène sur le marché de l’art

Alors que sa cote est en nette progression depuis trente ans, le marché de l’art aborigène est en bonne santé et constitue un investissement très intéressant pour tout collectionneur informé. Le produit des ventes spécialisées, qui ne dépassait pas les 18 millions de dollars australiens en 1989, est passé à 60 millions en 1997, 200 millions en 2002 et 300 millions en 2011.

Alick Tipoti, Murai, 2006

Un engouement qui ne cesse de croître

Abie Loy Kemarre, Bronze Bush Leaves – Trellis, 2019

L’art aborigène connaît depuis les années 90 un regain d’intérêt sur la scène artistique. L’engouement pour cet art est dû à la mise en place, en 1997, de ventes très médiatisées par Sotheby’s Australie. Depuis, le chiffre d’affaires réalisé en ventes publiques sur ce segment a été multiplié par six entre 1997 et 2003.

Par exemple, en juin 1997, Water Dreaming at Kalipinypa, une œuvre de Johnny Warangkula Tjupurrula, a été vendue à 125 000 euros chez Sotheby’s Australie. Trois ans plus tard, en 2000, l’œuvre s’est envolée à 270 000 euros dans la même maison de vente. Entre les nouveaux artistes et les grands noms de l’art aborigène, les prix oscillent d’une centaine d’euros à quelques milliers d’euros pour les jeunes artistes. Ils peuvent atteindre des records comme l’œuvre The Olgas for Ernest Giles de Brett Whiteley, vendue à plus de 2 milliards de dollars en 2007. Le pic du marché, en 2007, a été suivi d’une période de forte baisse du chiffre d’affaires des maisons de ventes aux enchères pour se stabiliser en 2014. 

L’art aborigène, un art contemporain?

Elizabeth Kunoth Kngwarreye, Yam seeds in my grandmother’s country, 2020

Les maisons de ventes semblent toutefois ignorer l’aspect très contemporain de cet art. Elles incluent les œuvres d’art aborigène dans la catégorie des « Arts anciens et ethnographiques ». En revanche, les artistes contemporains australiens sont, quant à eux, présentés dans la catégorie « Peintures, dessins et sculptures ». Un tel classement pourrait avoir des conséquences sur la visibilité de cet art. L’art aborigène est pourtant bel et bien vivant et présent sur la scène artistique contemporaine, ce que nous montrent les galeries d’art.

En effet, le marché français est particulièrement actif dans cette catégorie. D’importantes galeries spécialisées dans l’art aborigène, telles que Arts d’Australie – Stéphane Jacob, collaborent directement avec les artistes. Plus généralement, elles collaborent avec les coopératives et centres d’art qui promeuvent l’art aborigène depuis l’Australie. Celles-ci permettent d’offrir une sécurité financière et sociale aux artistes. Contrairement aux maisons de ventes, qui se concentrent presque exclusivement sur l’aspect historique de l’œuvre, les galeries d’art contemporain mettent en valeur les artistes qui l’ont réalisée. À cet égard, le marché de l’art aborigène a soulevé beaucoup de questions de droits d’auteur selon la conception occidentale. Dans la tradition aborigène, de nombreuses œuvres sont réalisées collectivement, et ne sont donc pas revendiquées par un seul artiste.

Pourtant la même problématique aurait dû alors se poser avec certains artistes occidentaux. Par exemple, Henry Moore travaillait souvent avec des apprentis et assistants. Rodin, lui, travaillait avec une fonderie pour couler ses bronzes et laissait l’un des sculpteurs travailler les détails à sa place. Ainsi, il est très important de s’informer sur la provenance de l’œuvre et d’en vérifier l’authenticité.

Un héritage de légendes et de savoir-faire

Teranie Williams Nangala, Wanakiji Jukurrpa – Bush Tomato Dreaming, 2018

Les motifs que l’on retrouve sur les œuvres actuelles sont similaires à ceux que l’on retrouvait sur les roches, les écorces ou encore le corps des Aborigènes. Ils symbolisent le lien entre le peuple Aborigène et le monde spirituel, ou bien racontent le parcours et l’enseignement de leurs ancêtres. Cet héritage de légendes et de savoir-faire constituerait la transmission la plus ancienne. Les dernières recherches archéologiques prouvent la présence d’œuvres sur roches datant de plus de 50 000 ans, constituant ainsi la toute première œuvre d’art au monde. Souvent produites à petite échelle, ce sont des œuvres qui ont une fonction importante dans la vie quotidienne de ces sociétés. Elles ne répondent théoriquement pas à un besoin exclusivement créatif.

Une réussite à double tranchant

Mali Isabel, Euphoria 6, 2021

Depuis leur introduction sur le marché, nombreux sont les artistes qui ont réussi à gagner une place importante sur le marché, tels que Rover Thomas ou Clifford Possum Tjapaltjarri. Le premier artiste aborigène, reconnu mondialement, Brett Whiteley s’impose comme l’artiste australien le plus coté de la décennie. La réussite de ces artistes est souvent fulgurante, en raison du petit nombre d’artistes de cette catégorie sur le marché et du faible nombre d’œuvres disponibles. Cependant, lorsqu’un artiste Aborigène perd de son authenticité, sa valeur décroît rapidement. Ainsi, l’histoire personnelle des artistes est particulièrement liée à leur réussite auprès des collectionneurs.

Un art soutenu par les institutions publiques

La peinture aborigène, art des « rêveurs » du bush et des déserts australiens, fascine les occidentaux et les institutions publiques. Par exemple, le Quai Branly ou le Musée des Confluences de Lyon lui ouvrent de plus en plus régulièrement leurs portes.  Chaque évènement et chaque exposition attire l’œil des collectionneurs sur cet art, qui combine message politique, aspect décoratif oscillant entre peinture figurative et abstraite, et témoignage culturel.




À propos d’Artsper

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